La neige s’était bien installée sur la ville. Tu avais enfilé un manteau épais pour prendre la route vers la boutique de tatouage. Comme d’habitude, le trajet se faisait à vélo afin de garder la forme et maintenir l’immunité de ton corps face aux rhumes et maladies diverses. Tu avais été embauché au salon presque directement, le patron avait adoré ton style artistique des portraits, mais pas seulement ; il t’avait également expliqué qu’il te trouvait quelque chose de mystérieux. Un côté ténébreux et classe dont il avait besoin dans son salon, parce que cela manquait de nouveautés. Son ancien employé lui avait volé de l’argent, ainsi qu’une bonne partie de ses clients, alors il voulait quelque chose d’innovateur. Tu n’avais pas bien compris son discours mais quand il t’avait proposé de te financer ta formation d’hygiène ainsi qu’un job assuré, tu t’étais dit « pourquoi pas ? ». Tu avais eu la patience d’aller jusqu’au bout. La vérité était que tu tentais par tous les moyens de te concentrer dans quelque chose pour ne pas devenir fou, ta vie était devenue beaucoup trop calme ces derniers mois, tu essayais de compenser avec l’apprentissage de plusieurs techniques de dessin et de tatouage, entre autre, ton patron te faisait confiance à cent pour cent, alors autant y aller.

C’était donc une journée de travail tout à fait banale, tu avais tatoué un Hibiscus sur le pied d’une adolescente, premier tatouage, tu n’étais pas bavard, elle avait eu peur de toi au départ, mais à la vue du résultat, elle t’avait remercié plusieurs fois. Il y avait eu ce motard aussi, qui voulait absolument terminer son aigle avant de déménager d’Okutama pour la capitale, où il rejoindrait la femme qu’il aime. Cela avait pris du temps, parce que beaucoup de détails, de couleur, de changements d’encre … Tu avais eu le temps d’entendre toute la vie de cette homme, et avant de partir, il t’avait tapoté le haut du bras en te félicitant avec un sourire et te laissa un bon pourboire. Tu avais haussé les sourcils, un peu étonné, alors que ton patron s’était mis à rire de la situation. Tu avais finalement haussé les épaules et posé l’argent dans un des tiroirs du bureau d’accueil du salon. Ton employeur en ferait sûrement bon usage.

Tu étais passé dans la salle pour désinfecter le matériel, puis aux toilettes pour te laver les mains. Tu entendis vaguement la sonnerie du téléphone de la boutique une petite seconde avant que la voix de ton employeur ne couvre le tout. Tu pris donc le temps de finir ce que tu faisais, quand ton patron fit irruption, manquant de te tuer d’une crise cardiaque au passage, le tout camouflé par ton air habituellement blasé. Il te demanda alors de prendre le téléphone et la commande de la jeune femme au bout du fil parce qu’il y avait plusieurs personnes pour se faire percer. Tu ne réfléchis pas plus longtemps, hochas la tête et t’installas dans son bureau pour reprendre l’appel entrant. Tu pris une grande inspiration et finalement, d’une voix morne, tu parlas. « Bonjour, que puis-je faire pour vous ? »

L’hiver, son froid qui fait frissonner, le calme grandissant dans les rues, le drap blanc qui recouvre la ville doucement atténuant l’agressivité des néons, donnant à l’ambiance générale un aspect cotonneux.
Kikyo se sentait bien en cette douce journée, regardant la neige tomber doucement depuis sa fenêtre, assise au chaud chez elle réfléchissant calmement. Après tout, elle avait passé la fin de matinée à s’entraîner avec ses éventails, elle trouvait des défauts à ses mouvements ces derniers temps. Peut-être était-elle trop fatiguée ou sa vie tournait-elle trop en rond. Tout se répétait depuis un moment, ça l’ennuyait au plus haut point, comme si elle était coincée dans une boucle infinie.

Une tasse de café à la main, elle soufflait dessus pensive. Elle avait toute la journée devant elle, pas de livraisons à réceptionner au bar, ni de commande à passer pour de nouveaux alcools. Les comptes étaient à jour également et l’établissement n’ouvrait que dans la soirée, définitivement, il fallait qu’elle fasse quelque chose de sa journée.
Réfléchissant à ce qui pourrait l’occuper assez longtemps un projet qui traînait depuis longtemps dans un coin de son esprit lui revint.
Pourquoi ne pas réfléchir à son nouveau projet de tatouage, voilà longtemps qu’elle avait fait son renard sur le bras, la sensation de l’aiguille sur sa peau lui manquait. Une fois qu’on y a goûté de toute manière, on ne peut s’empêcher de recommencer, les gens sur ce sujet ne mentent jamais, c’est comme une addiction.

Contemplant sa tasse maintenant vide elle se leva pour relancer la machine à café, le temps que tout chauffe, il fallait qu’elle retrouve ce vieux croquis qu’elle avait travaillé une fois dans l’optique d’un nouveau tatouage.
Il doit sûrement traîner quelque par dans sa chambre, ou dans un tiroir du bureau.
Après quelques petites minutes il s’avéra que le dessin était bel et bien dans son bureau. Il ne ressemble d’ailleurs pas à grand chose, s’il y a bien une chose que Kikyo ne sait pas faire c’est dessiner, mais ce n’était pas l’important puisqu’un tatoueur normalement sait faire un croquis lui-même.
Récupérant sa nouvelle tasse de café, elle reprit place au bord de la fenêtre décidant qu’elle allait rechercher le tatoueur qui lui plairait le plus dans son style.
Elle alluma une page internet pour rechercher quelques informations sur les tatoueurs de la petite ville.
Elle n’avait aucune idée des meilleurs ou pires tatoueurs, il en était de même pour les salons.
N’ayant rien à faire de sa journée autant prendre le temps de se renseigner et si un salon l’attire Kikyo aura juste à appeler pour parler de son projet plus concrètement.
Après une bonne heure de recherche intensive, un artiste attira son attention, il était nommé comme Yasuhisa sur le site du salon et avait un style plutôt intéressant pour le projet qu’elle avait en tête du moins des quelques photos de son travail qu’elle avait pu trouver.

Après une heure supplémentaire à fouiller, il était clair pour Kikyo que ce Yasuhisa était bien le tatoueur le plus intéressant pour le moment, elle prit donc une grande inspiration et se décida à passer son coup de fil.

Un homme décrocha le téléphone après quelques secondes, se présentant comme le gérant de l’établissement, puis la prévenant rapidement qu’il allait lui passer quelqu’un d’autre il la mit en attente et après quelques secondes supplémentaire c’est un autre homme qui lui répondit. Elle inspira profondément et prit la parole pour lui répondre calmement.

« Bonjour, je vous appelle pour quelques renseignements.
J’ai un projet de tatouage pour un dos complet, mais absolument aucun croquis, j’aurais aimé prendre rendez-vous pour en parler plus en détail et voir si mon projet est réalisable.»

La politesse et toi étiez très proches. Même lorsque tu as subi un interrogatoire, il ne t’est pas venu à l’esprit de tutoyer ton interlocuteur ou même de lui manquer de respect dans les paroles et formules de respect typiquement japonaises. Les salons de tatouage avaient cette particularité d’être sympathiques, d’être familiers pour mettre à l’aise le client, mais toi, tu n’y arrivais tout simplement pas. Ton employeur te faisait la remarque pour rire des fois, mais tu te contentais de baisser les yeux, conscient que ce n’était pas possible pour toi. Tu avais vécu dans les montagnes, dans des valeurs traditionnelles, et ces dernières continuaient de te coller aux basques, comme une deuxième peau. Tu ne te battais plus contre tes réflexes et tes origines, tu étais toi, et il n’en était pas autrement.

Il était rare que tu sois au téléphone, le patron aimait bien répondre et être « familier » avec les clients ou futurs masochistes sur la table. Il savait que tu ne pouvais pas alors il attirait le monde comme ça. Cependant, tu étais parfois demandé comme tatoueur, pour tes dessins particuliers, tes portraits pour la plupart, et ta vision … Mystérieuse de la vie en général. Il était arrivé que tu tatoues tes créations, mais on avait déjà commandé des portraits pour ensuite les graver sur une peau. Des visages d’enfants, pour se souvenir à jamais de la beauté de la vie dans un ventre, ou bien des reproduction de personnes aujourd’hui disparues, des grand-parents, des parents, des tantes, des oncles … Tu avais également dû reproduire, une fois, le visage d’une idole à partir d’une photographie postée sur Internet. Ce n’était clairement pas le plus amusant des projets, mais tu devais savoir tout faire dans ce métier. Tu ne perdais rien pour t’améliorer quand une occasion se présentait d’ailleurs.

Ta voix résonna dans la salle d’accueil et d’attente du magasin comme un vieux disque rayé. Tu ne parlais que rarement, sauf pour des banalités. Ta pomme d’Adam vibrait sourdement à cause du grave de tes paroles, et tu paraissais avoir quarante ans. Tu écoutas attentivement cette jeune femme te faire part d’un projet et d’un rendez-vous pour en parler, sûrement pour dessiner ce qu’elle attendait également. Tu réfléchissais à ce qui était le mieux, ce que tu pouvais te permettre également. Tu n’aimais pas dessiner au salon, c’était trop strict, tu te sentais parfois observé. Tu aimais les lieux extérieurs sans trop de foule, les cafés par exemple, et surtout pour te concentrer, il fallait qu’on te parle. Tu adorais le silence, mais dans des circonstances bien particulières ; tu ne le supportais que quand tu étais seul. Peut-être que tu avais pris cette habitude il y a un moment déjà mais qu’elle s’était accentuée avec ce nouveau job. Après tout, pour un tatouage qui durait plusieurs heures, si le client ne parlait pas, tu ne te sentais pas concentré. Étrange.

« Très bien. » Tu laissas un instant de quiétude planer dans la conversation. Comme si tu étais parti, comme si tu t’en fichais, mais tu réfléchissais simplement à ce qui était le mieux. « Pourrai-je vous proposer un rendez-vous à l’extérieur afin d’en discuter ? » Tu n’étais pas en train de flirter, c’était une question tout à fait sérieuse. Cependant, il n’était pas dans ta nature d’épiloguer ou de te justifier. « Quand êtes-vous disponible ? Je m’arrangerai pour faire de votre projet une priorité. » Une priorité vis à vis de Memoria, ou de tes séances de sport surtout. Tu demanderais sûrement un jour de congé à ton employeur, afin de ne pas t’absenter de ton lieu de travail.

L’homme qui avait répondu au téléphone en second paraissait de prime abord beaucoup moins avenant que le premier, mais se formaliser là-dessus aurait été une grossière erreur. La voix d’une personne ne veut rien dire en elle-même, cependant, la manière de s’exprimer montre énormément de choses.

La personne qui était à l’autre bout de la ligne était sûrement peu habituée à communiquer au téléphone, les secondes de silence qu’il laissait le prouvait presque à coup sûr. Après tout tatoueur ne veux pas dire sociable constamment. 

Kikyo sourit, légèrement amusée de ces légers silences, attendant patiemment que l’homme réponde dans sa totalité avant de reprendre la parole elle-même.

Mais ce fut au tour de la jeune femme de laisser quelques secondes de battement dans la discussion à peine entamée. La demande on ne peut plus originale l’ayant surpris soudainement. 
Elle n’avait pas anticipé la proposition d’un rendez-vous en dehors du salon, c’était surprenant. Fermant les yeux une seconde pour réfléchir à une réponse qui se voudrait concrète. 
Et quand était-elle disponible... À peu près tout le temps finalement, secouant la tête et revenant a elle rapidement elle prit une brève inspiration. 
La conversation était formelle et ça lui était plus qu’agréable, les marques de respect étant des éléments très importants dans sa vie.

« Pardonnez-moi du silence instauré, je réfléchissais à ce qui serait le mieux, si cela ne vous dérange pas je travaille au Kitsune no toriku, au centre-ville , chaque soir, bien sûr si vous êtes disponibles en dehors de vos heures de travail habituelles. 
Dans un autre cas, je suis disponible en journée, les après-midi, selon votre convenance bien sûr, je m’en voudrais d’empiéter sur vos journées.»

Il était plus simple pour Kikyo de prendre du temps sur ses soirées pour discuter, surtout qu’elle pouvait se dégager simplement une heure dans son travail pour discuter, après tout les serveurs qu’elle embauchait pouvaient travailler sans sa supervision, ils s’en sortaient même très bien.
Elle se sentit soudainement impolie et reprit la parole brièvement.

« Bien sûr si vous venez au Kitsune No Toriku, je vous offre vos consommations, c’est la moindre des choses pour le temps que vous m’accorderez afin de travailler ma demande.»

Kikyo soupira ensuite, ce qu’elle détestait oublier des éléments dans une conversation, surtout que l’homme acceptait de travailler rapidement sur le projet, et elle en oubliait toute politesse, certes elle allait payer l’œuvre, mais beaucoup avaient tendance à oublier tout le travail qu’impliquait un tatouage en dehors de juste se faire encrer le corps.
Le tatoueur prenait toujours de son temps pour réfléchir, pour dessiner, effacer, recommencer, jusqu’à satisfaction de son client, quelques boissons n’étaient donc que maigre dédommagement en échange de tout cela.

Elle mena sa tasse à ses lèvres, prenant une gorgée de son café qui avait tiédit en attendant une réponse de son interlocuteur.
Elle espérait que sa proposition de venir dans son établissement allait lui convenir, sinon ils trouveraient bien une organisation différente pour ce rendez-vous.

Après avoir parlé, tu continuais de réfléchir à ce qui était le mieux. Tu t’adapterais de toute façon, tu étais comme ça, même si fut un temps, c’était toi qui imposait absolument tous les détails possibles et imaginables. Tu essayais de te fondre dans la masse à présent, d’être « normal » et de ne pas dépasser les bornes. Après tout, les conditions de ta libération était plus que floue alors autant ne pas faire de vagues maintenant. Tu ne voulais pas retourner en prison, c’était hors de question. Tu avais besoin de ta liberté, d’une sacrée marge de manœuvre pour vivre, et bien que la prison n’était pas ce qu’elle était il y a quelques années en arrière, toi, tu ne ressentais pas vraiment de confort à être enfermé et coupé de tout. Tu te perdis dans tes pensées, sans prendre gare au temps qui défilait, au secondes de silence au téléphone. Tu ne te souvenais même plus que tu étais en communication avec une femme au bout du fil ; tu clignas plusieurs fois des yeux lorsque sa voix te parvint à nouveau à l’oreille. Tu te rappelas alors de l’endroit où tu te trouvais, et de ce que tu devais faire. Cette liberté rendue devait être profitée.

Tu l’écoutas avec attention. Elle travaillait dans un établissement nocturne, si tu comprenais bien sa demande, et il était tout à fait possible que tu la rejoignes sur ses heures de service pour en discuter. Tu ne savais pas si c’était une bonne idée. Plus du fait que tu avais besoin de lumière naturelle pour dessiner. Tu ne pouvais pas réellement savoir dans quel domaine elle travaillait, Okutama était une ville vraiment animée de jour comme de nuit, alors tu préférais ne pas demander et opter pour une autre solution. Presque immédiatement, elle s’excusa et proposa alors de t’offrir toutes tes consommations. Tu haussas un sourcil, en devinant qu’elle gagnait son salaire dans un bar, et cela confirma ce que tu pensais précédemment. La luminosité nécessaire à ta création n’était pas l’idéal dans ces lieux, et tu te sentis obligé de décliner sa proposition pourtant généreuse. Une terrasse de ce temps, ce n’était pas l’idéal, avec la neige qui tombait sur la ville, tous les restaurants et cafés avaient rangés leurs tables et chaises d’été. Tu n’avais donc pas beaucoup d’alternatives, mais tu ne pouvais pas non plus t’incruster chez elle, ni même l’inviter dans ton appartement. Tu n’aimais pas que quelqu’un y entre, ton côté maniaque se reflétant parfaitement ici.

Soudainement, une idée effleura ton esprit. « Peut-être pourrions-nous nous rencontrer dans une des serres du Quartier des Plaisirs ? La luminosité y est bonne, des tables sont parfois libres pour s’asseoir. Cela serait un cadre naturel et idéal pour moi dans la réflexion de votre tatouage. » Il faisait toujours bon dans les serres, et les tables te permettraient d’étendre tous tes outils de travail pour créer l’œuvre de sa vie. « Je suis navré de refuser votre offre, bien que généreuse … » Mais tu n’avais pas le choix ici pour le moment. Sur un bout de papier, tu notas tout de même, d’un stylo à bille noir, le nom de l’établissement qu’elle avait mentionné plus tôt, pour pouvoir te renseigner ensuite. Peut-être que cela t’inspirerait quelque chose pour le dessin, comme une ambiance générale ou un thème probable.

Les serres, disait-il, Kikyo n’y avait jamais mis les pieds, même si elle appréciait les plantes passer un après-midi dans un lieu passablement trop chaud et humide juste pour observer ne lui avait jamais effleuré l’esprit.
Cependant y aller avec une raison serait peut-être le moment idéal de découvrir le lieu et de profiter pour faire une chose différente de sa routine habituelle. De plus si ça pouvait aider l’homme dans son travail et lui faciliter les choses en général, ce serait aussi bien.


« Eh bien si vous préférez les serres alors cela me convient aussi. Disons peut-être dans deux jours si cela vous convient, je suis disponible tous les après-midi sans problème, dites-moi une heure et je viendrai. Merci d’accepter de travailler sur mon projet encore une fois.»

Si le jour et le lieu étaient actés, décider d’une heure se ferait instantanément. Mais Kikyo préférait laisser à son interlocuteur le choix, après tout, c’est lui qui allait travailler, il valait donc mieux que la décision soit sienne. Elle pouvait de toute manière adapter ses journées à sa guise sans avoir à se soucier de quoi que ce soit.
Se relevant, elle commença à marcher lentement dans sa demeure, ses jambes engourdies d’être trop restée assise, l’appel touchant à sa fin elle pourrait également enchaîner sur quelque chose à faire.
Elle frissonna, ses pieds nus sur le sol frais et soupira, elle devrait sûrement donner à cet homme son nom ainsi que la manière la plus aisée de la reconnaître au rendez-vous, cela serait plus malin que de passer une éternité à trouver une personne que l’on a jamais vu.

« SI cela peut vous être utile je suis Tamafune Kikyo, je pense que cela est utile pour vos registres, et lors du rendez-vous cherchez une femme en kimono, ce sera plus simple.
Je vous souhaite une bonne journée et au plaisir de vous rencontrer pour mon projet.»

Elle laissa tout juste le temps à la personne en face de lui répondre qu’elle raccrochait en étirant ses membres, les appels étaient toujours une corvée, tenir une conversation avec un inconnu sans même savoir à quoi il ressemblait, un calvaire.

Kikyo avait toujours détesté les conversations longues, mais pour une fois avec le froid extérieur, il était plus agréable d’appeler et de rester chez soi que de sortir prendre un rendez-vous en personne.

Un certain soulagement apaisa les traits durs de ton visage lorsqu’elle accepta le rendez-vous aux serres du Quartier des Plaisirs. Tu notas donc le jour du rendez-vous et proposas dans la foulée une rencontre à treize heure trente, devant l’entrée de la Serre, afin de pouvoir commencer à visiter les lieux ensemble et trouver un endroit où tu pourrais déposer tes crayons. Tu prendrais évidemment une planche suffisamment grande pour pouvoir dessiner debout sans être embêté. Cela dépendrait de ton inspiration. Quoi qu’il en soit, tout était enfin planifié, et tu pourrais alors te préparer pour une entrevue qui ressemblait à un rencard amoureux. Heureusement, ton patron savait que tu avais besoin d’espace pour laisser ton imagination et ton talent artistique s’exprimer. Ce monsieur s’était posté derrière toi, et écoutait ton échange. Tu avais senti sa présence revenir quelques minutes après. Peut-être qu’il était curieux de savoir comment tu t’en sortais. Tu ne savais pas, et tu ne poserais pas de questions. Tu notas le nom complet de la femme que tu rencontrerais deux jours plus tard, pour ne pas oublier. L’appel prit fin une minute après, tu te retins de pousser un soupir, alors que ton boss venait donner un petit coup de coude sur ton bras. Il te taquina avant de retourner à ses affaires. Ta journée était loin d’être finie, il était temps de retourner au travail.